Thursday, February 21, 2013

Photovoltaïque : des taxes européennes à l'import nuiraient à l'emploi et à l'activité de la filière

Article publié le 20 février 2013 sur www.actu-environnement.com
Par Sophie Fabrégat

Alors que les tensions s'accroissent sur le marché photovoltaïque entre l'Europe et la Chine, une étude suisse estime que la mise en place de barrières douanières par l'UE pénaliserait la chaîne de valeur européenne.
Des mesures protectionnistes européennes menaceraient plus de 200.000 emplois dans l'installation, l'ingénierie mais aussi la fourniture de matières premières et composants. 

Les recours de fabricants européens du photovoltaïque contre la Chine se multiplient auprès de la Commission européenne. Le groupement d'entreprises européennes EU ProSun en juillet et en septembre, et les fabricants de verres solaires en février ont déposé des plaintes pour pratiques commerciales déloyales et subventions illégales. Dans la foulée, la Commission a ouvert deux enquêtes : une première en septembre sur des pratiques commerciales déloyales, une deuxième en novembre sur des subventions à l'exportation de panneaux solaires et de composants essentiels (wafers, piles). De nombreux acteurs demandent, pour lutter contre la concurrence chinoise, l'installation de barrières douanières pour les produits photovoltaïques.
Pourtant, une étude de l'institut économique suisse Prognos, présentée par l'Alliance pour une énergie solaire abordable (Afase) lors d'une audition devant la Commission européenne le 18 février, estime que l'installation de droits anti-dumping ou compensatoires sur les produits chinois importés aurait un impact négatif sur le marché européen du solaire et donc sur l'emploi dans le secteur, sur la période étudiée (2013-2015). Un constat déjà souligné par Canadian solar au moment de l'ouverture de la première enquête européenne sur les pratiques commerciales des fabricants chinois en 2012 : "La majorité des industriels de la filière sortiraient perdants d'une [telle] initiative menée par quelques représentants du secteur au bénéfice de leurs seuls intérêts individuels", avait alors estimé le président des activités européennes de la société, Gregory E. Spanoudakis.

Coup de frein sur le marché photovoltaïque
"Si des droits antidumping et/ou compensatoires étaient imposés, ceux-ci augmenteraient le prix des modules photovoltaïques chinois, des cellules et des plaquettes. Cette hausse de prix entraînerait une augmentation des coûts d'installations. En conséquence, la viabilité de l'installation de modules photovoltaïques dans de nombreux marchés sera impactée négativement, en d'autres termes, le marché PV européen diminuera", indique Prognos. Toute la chaîne de valeur photovoltaïque se trouverait impactée par cette baisse de la demande, des installateurs aux services d'ingénierie, en passant par les fabricants européens d'équipements de production ou des fournisseurs de matières premières et composants qui approvisionnent la Chine.
Seul impact positif : les producteurs européens de cellules, modules et plaquettes photovoltaïques pourraient voir leurs ventes augmenter, mais cette hausse de la valeur ajoutée devrait être limitée, et ne sera jamais suffisante pour compenser les pertes sur l'ensemble de la chaîne de valeur, note Prognos."L'emploi, qui augmente en raison de la production accrue de produits solaires au sein de l'UE, représente tout au plus 17-20% des emplois perdus le long de la chaîne de valeur". Les gains de valeur ajoutée représenteront quant à eux, 10 à 15% des pertes.

Plus de 200.000 emplois en péril
L'institut étudie plusieurs scénarios (droits de douanes à 20%, 35% et 60%) mais tous aboutissent aux mêmes effets.
Ainsi, le premier scénario entraînerait une perte de 115.600 emplois dans l'Union européenne la première année, dont une grande majorité en Allemagne (plus de 45.000) et 5.900 en France. Les pertes d'emplois se poursuivraient en 2014 (-146.500) et 2015 (-175.500). La baisse de la valeur ajoutée est estimée entre 4,74 et 7,5 M€ par an.
Avec des droits de douanes à 35%, l'impact négatif sur l'emploi est plus fort (-214.700 en 2013, -248.400 en 2014 et -276.100 en 2015), légèrement compensé par des gains d'emplois (respectivement 15.000, 26.400 et 31.900). Idem pour la valeur ajoutée (de -9 à -12 M€).
Enfin, en portant les droits à l'import à 60%, les pertes nettes d'emplois se situent entre 200.000 la première année (dont plus de 6.000 en France) et 240.000 en 2015. La perte de valeur ajoutée (entre 9,64 et 12,69 M€) n'est pas compensée par l'augmentation d'activité de la filière européenne (+1,7 à 2,4 M€).

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